J’attends impatiemment chaque parution de Hélène Dorion. Celle de Mes
forêts aux Éditions Bruno Doucey en 2021 ne fait pas exception.
Comment vous expliquer ce recueil ? Imaginez la poète installée au milieu d’un secteur boisé qui écrit au rythme des saisons et des cycles. Vie, envol, retombée, apparente mort, renaissance. Tout s’écrit sur le lichen et tout s’inscrit sur l’écorce des grands arbres. Sous son regard, la nature vibre. Même le silence est chargé de battements d’aile de la chouette, de feuilles soulevées par le vent, de rais lumineux traçant un chemin sur la neige. La mousse absorbe une partie de l’eau du ruisseau où une biche s’abreuve les oreilles bien tendues. La clarté rend les jeunes pousses presque translucides. La buse est aux aguets et un renard là-bas renifle les herbes nouvelles. Un souvenir familial remonte à la mémoire : la mère attentive et prévenante chantait, le père détournait trop souvent le regard, les deux sœurs rêvassaient sous les promesses de l’été. Puis est venue la conscience du monde et de ses horreurs et de ses possibilités créatrices ou destructrices, selon les humains. La poésie ici est impressionniste faite de ressentis.
La poète retourne toujours vers ses forêts pour se recentrer, s’apaiser, goûter à l’amour, écouter de la musique, gambader par les sentiers, dénicher une strophe ou une image. Ainsi, la genèse des textes point à l’aube.
Le recueil Mes forêts est du baume et une accalmie au milieu du chaos des jours. À lire évidemment.
Extrait :
«
mes forêts sont des greniers peuplés de fantômes
elles sont les mâts de voyages immobiles
un jardin de vent où se cognent les fruits
d’une saison déjà passée
qui s’en retourne vers demain »
©
Photo, texte du billet, sauf l’extrait d’H. Dorion, Denis Morin, 2022