D’entrée de jeu, je vous fais cette confidence : trop gauche je n’ai jamais été doué pour les sports, mais j’aime la ténacité et l’atteinte d’objectifs des sportifs. Par contre, des livres sur l’histoire de l’art, j’adore. Dans le présent roman Dripping sur tatami, paru en 2021 dans la collection Nouvelles Pages chez JDH Éditions, nous avons la synthèse de ces deux univers, judo et peinture. Pas banal du tout, vous dis-je.
En parcourant les premières pages, je suppose qu’Hector Luis Marino est Hugo qui nous racontera son histoire familiale de l’Algérie, à Marseille, sa valse-hésitation entre la création artistique et le sport, le retour de cet ancien amour pour la peinture et la prise sous son aile de deux talentueux jumeaux. Il les entraîne, les encourage, les protège comme s’ils étaient ses enfants. Maître Nagao, un sensei, les guidera aussi dans leur entraînement. C’est par ces deux jeunes qu’Hugo retournera aux sources en Algérie. La vie est une suite ininterrompue de cycles, de retournements, de prises de conscience.
Au parcours d’Hugo sont intercalés des segments relatifs à Yves Klein et à Nicolas de Staël. Si le premier peintre a sauté dans le vide dans un but artistique, le deuxième du haut de sa terrasse est appelé par le vide et le tourment amoureux. Puis Hugo retombe aussitôt sur ses pattes dans le fil narratif qui nous amène un peu plus loin.
Hugo sera-t-il reconnu comme peintre ? Hakim et Farrid monteront-ils sur les podiums ou seront-ils condamnés au désœuvrement des banlieues ? Et si l’existence nous poussait justement à dépasser nos limites.
Hector Luis Marino écrit avec l’esprit et le cœur. L’empathie, le silence, la beauté, le besoin de créer font partie de son univers quotidien. On le sent bien. Pour l’amour du judo et pour celui de la peinture, je vous invite à lire ce roman hybride. Ippon!
À présent, je lance le défi à l’auteur de nous écrire une suite. Imaginons Hakim et Farrid dix ans plus tard. À suivre.
Extraits :
« Son admirable équilibre ne tenait justement que par son apparent inachèvement et il suffirait d’un trait, d’un point pour gâcher probablement l’œuvre de sa vie. Nicolas de Staël s’inquiéta en s’imaginant le lendemain, délesté de cette lucidité que seul l’alcool pouvait lui offrir, être dans l’incapacité de résister au besoin de vouloir faire mieux encore et saccager par un aplat de trop l’absolue harmonie de la toile. »
«
Ferrid se vêtit du judogi blanc pourvu du dossard et de l’emblème de la France,
et Hakim du judogi bleu, celui de l’équipe nationale algérienne. (…) Leur
secrète initiative représentait pour eux l’acte d’amour suprême. Voilà la seule
raison pour laquelle ils se battirent comme des chiens. Pour que leur propre
identité soit effacée au profit de l’autre, dans un monde où la notion même de
la compétitivité impose l’anéantissement d’autrui au profit de sa propre gloire
personnelle. »
©
Photo, texte du billet, sauf les extraits de HLM, Denis Morin, 2022
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