mercredi 6 mars 2024

Billets de Contrebande (Inédits) de Alain Cadéo

 


Un matin, j’insère ma clef à mon casier postal de la boîte communautaire au coin de la rue, je me dis qu’encore et toujours des factures m’attendent, puis ô surprise voilà une enveloppe comme une invitation à l’évasion et au voyage.

De retour à la maison, je l’ouvre, ravi d’y trouver Billets de Contrebande (Inédits) d’Alain Cadéo qui vient de paraître chez Éditions La Trace, une maison pour des plumes singulières.

Il y a chez cet écrivain un mélange fascinant de l’homme taciturne et de l’enfant émerveillé d’une fleur à peine éclose et d’une tartelette douce-amère au cassis. Bref, il s’enchante des simples choses comme de la magnificence de la vie.

C’est justement cette capacité de s’élever au-dessus de la mêlée qu’a Alain Cadéo qui me questionne sur la résilience et la rigueur de l’écrivain solitaire, se tenant loin de la cohue des villes. Préférant le sifflement du vent au babillage des hommes, il écrit dès l’aube ou presque ses réflexions, accompagné des effluves du café noir.

Maintenant, j’ouvre la couverture bleu sarcelle avec cette bordure hachurée comme si on avait déchiré un feuillet, puis je plonge et me délecte au gré des pages. Il n’y a pas de chapitres à proprement parler, juste des réflexions lumineuses sur l’écriture, la vie, sur nous les êtres humains qui sommes des passagers dans le temps qui nous est alloué. Le Verbe prime et tout segment de texte se veut comme l’équilibriste sur son fil de fer. J’avance dans ces réflexions ponctuées de mots-repères comme les bornes d’une route empruntée. Je m’éloigne, je prends la pause entre deux segments, je me rassasie et j’étanche ma soif.

Alain Cadéo s’accuse lui-même de tout oublier. Tant mieux s’il bénéficie de la grâce de l’oubli. Parfois, ça peut être salutaire. En revanche, ce que je retiens de lui et de sa prose philosophique et poétique, c’est que lire du Alain Cadéo, c’est savoir entrer dans la fête.

Extrait : « Je suis la brosse et le pinceau entre les mains d’un peintre primitif secoué de visions, un barbouilleur tout d’intuitions avec des gestes incontrôlés… Je laisse courir les mots, mûrir et éclater comme bon il leur semble. Ils sont le pétillant, le vif et le sacré. Et tant que je serai récolteur de leurs braises, j’aurai tout le bonheur des improvisations. »