dimanche 31 juillet 2022

Anne Hébert, contre vents et marées de Michel Lord

 

Miche Lord, professeur, chercheur, chroniqueur littéraire à la revue de la nouvelle XYX, toujours directeur adjoint aussi de la revue University of Toronto Quaterly, ne cesse d’écrire et de lire. C’est sa respiration. Cette fois-ci chez Lévesque Éditeur, il s’intéresse au corpus littéraire d’Anne Hébert. Il étudie savamment et brillamment les thèmes (vie, mort, amour, haine, chute, dislocation), les récurrences, l’interpénétration de la poésie et de la prose.

Cet ouvrage met très bien en scène cette ex-scénariste aux allures de sage couventine qui s’exila à Paris pour mieux se distancier d’un Québec conservateur et oppressant. Cela contextualise et déclenche l’imaginaire. Elle put alors dénoncer les contraintes abrutissantes et crier à haute voix sa rage de vivre. Prendre sa place au soleil à titre d’artiste et de femme. D’ailleurs, Anne Hébert elle-même et son entourage québécois se surprennent des élans passionnés et de la violence étalée émanant de cet être pareil à une eau dormante.

En outre, cette analyse savante a le mérite de vouloir plonger dans l’œuvre de cette ambassadrice des lettres québécoises et canadiennes.

De mon côté, ce livre résonne en moi, puisque mes plumes préférées à la fin de l’adolescence étaient Yourcenar, Duras, Yves Navarre et Anne Hébert. Michel Lord identifie bien les raisons pour lesquelles le lectorat pouvait et peut encore être fasciné par elle.

Je ne peux que vous encourager fortement à lire la présente étude de Michel Lord et à vous procurer les écrits d’Anne Hébert.

 

© Photo, billet, Denis Morin, 2022


mardi 19 juillet 2022

In extremis de Sylvain Turner

 

Sylvain Turner est un artiste dans l’âme et un orfèvre des mots. Il conçoit, rédige, traduit, se fait chroniqueur littéraire, parolier. Il a publié entre autres dans les revues Gaz Moutarde, Possibles, Exit. C’était un ami intime de feu le poète Denis Vanier. Sa trajectoire l’amène à la parution du recueil de poésie In extremis en 2022 aux Éditions TNT à Montréal.

La lecture de ce recueil me chamboule. C’est émouvant et troublant. Un homme se promène, déambule, à ce qui ressemble à un étrange purgatoire. Notre monde. Témoin de l’actualité, des crimes commis au nom de différentes idéologies, sans oublier les tourments de l’amour et de la chair.

Les courts textes de prose poétique sentent le (dés)espoir, la vie qui se consume, le jour qui nous désole, la nuit où l’on jouit, la sueur, le sang ou le sperme à peine séché. Il est bien rare de lire de la poésie qui nous ramène aux excès de Baudelaire ou de Jean Genet. Vraiment troublant et cru. Ce poète longe vos vies sans que vous vous en aperceviez; il va par les boulevards et les rues. Rien ne lui échappe. Il capte tout.

Voici un tout nouveau poète au catalogue de chez TNT. Je suis preneur du poète et de ses textes. À découvrir.

Extraits :

« L’enfant tire sur la porte d’acier avant d’investir les lieux. Je pars à sa suite, incapable de l’abandonner à son sort dans cet endroit propice à tous les crimes. J’entends ses pas s’éloigner dans un silence de mort subite, lui crie de m’attendre. Je n’obtiens pour toute réponse que l’écho d’une voix qui ne m’appartient plus. Je reste là, interdit, à crever mes encres. »

« Je m’égarais dans les angles morts de son regard, me perdais dans ses étreintes éthyliques. Quand je dormais, elle trafiquait les lignes de nos mains et mettait le feu à nos cartes du ciel, déterminée à réinventer notre destinée. » 

© Photo, texte du billet, sauf les extraits de Sylvain Turner, Denis Morin, 2022


vendredi 1 juillet 2022

Bizzareries du banal de Éric C. Plamondon

 

Éric C. Plamondon a l’impression d'écrire depuis toujours. Il excelle visiblement dans la nouvelle. C’est ainsi que Les Éditions Sémaphore nous proposent le recueil de nouvelles Bizarreries du banal, soit 13 histoires étranges.

J’aime ces histoires brèves qui se lisent au lit avant l’assoupissement ou par moment d’insomnie ou bien dans un trajet en métro. Économie de mots, intrigues, chutes assurées.

Voici les titres :  Une journée entre amis, Le réparateur de télé, Le reliquaire, L’actrice, Les lunettes, Ascenseurs, L’invitée, Patriotes, Verdure, L’accident, Récit descriptif, Circulez!, Le visage.

Ces titres confèrent déjà au livre une bonne part de mystère, car l’auteur s’éloigne dès les premières lignes de leur apparente banalité.  En les écrivant sur le présent billet, il me revenait à l’esprit ces êtres étranges qui vivent en parallèle avec les citoyens dits ‘’normaux’’. Vous les croisez à la quincaillerie ou au supermarché, ils vous observent l’air de rien, voyant en vous un ami/ennemi potentiel.

Il est de ces jours où un choix fait, un chemin emprunté, une décision changent la donne, où le destin dérape comme si une pelure de banane avait été placé expressément là sous la semelle pour faire tomber le marcheur.

Je suggère fortement à l’auteur de s’orienter vers le roman policier, car il sait tenir le lecteur en haleine et crée des ambiances plutôt terrifiantes, si on se met dans la peau de certaines ‘’proies’’.

Disons que c’est bon signe, quand on regarde une couverture et que les histoires remontent en surface. Courrez vite chez votre libraire pour commander votre exemplaire.

Pour en savoir un peu plus sur cette nouvelle plume, je vous suggère de consulter son site ericplamondon.com.

Extraits :

« Il me fallait également un motif crédible pour expliquer ma présence chez eux durant plusieurs semaines. Je résolus de me présenter comme un écrivain à la recherche d’inspiration et de tranquillité pour la rédaction de son premier roman. Classique, mais ça pouvait marcher. »

« C’est la panique dans les cirques partout au pays. Depuis qu’un troisième visage a été découvert, toujours dans les mêmes circonstances, les clowns n’ont plus envie de rire. Comme c’est le cas dans la plupart des cirques depuis la découverte du deuxième visage, la troisième victime était accompagnée par un gardien de sécurité jusqu’à ce qu’il soit démaquillé et changé. »

© Photo, texte du billet, sauf les extraits d’Éric C. Plamondon, Denis Morin, 2022