dimanche 13 juin 2021

Au nord de ma mémoire de Mattia Scarpulla

 

Mattia Scarpulla cultive le mystère. On sait de lui que c’est un intellectuel de haut calibre s’intéressant à la danse, aux lettres et aux langues. Il est né à Turin, puis il a transité par la France et la Belgique avant de venir s’installer au Québec.

Tout récemment, il a publié le fulgurant roman Errance chez Annika Parance Éditeur et il a codirigé le recueil collectif Épidermes chez Tête Première. Nous le retrouvons ici dans Au nord de ma mémoire, dans la collection Sauvage, toujours chez Annika Parance Éditeur. 

On touche ici à la poésie. L'absence de ponctuation libère la lecture et confère contre toute attente du rythme aux textes. Mattia dénonce le musèlement des citoyens et nos vies codifiées. Il s’interroge sur la communication facile ou opaque entre les êtres. Fasciné par les corps et les mouvements, à l’instar de Rodin, il fragmente et assemble les membres. Il chorégraphie les intentions, les départs et les retrouvailles. Loin d’être une âme en peine, je perçois le citoyen du monde qui embrasse la vie et les liens humains dans toute leur complexité. Il est Turin, Paris, Brest, Bruxelles et Québec. Il cumule en lui ces villes comme autant de strates, d’expériences, de souvenirs dont ses mots sont empreints. J’entends ses pas au musée, je le vois traversant le temps et les places, chargé du poids de l’amour et de l’exil. Il est d’ici et d’ailleurs. Grazie mille per quest’opera. Ti voglio bene. 

© Photo, texte du billet, sans les extraits de Mattia Scarpulla, Denis Morin, 2021 

Extraits : 

« Des caméras tout autour continuent à épier notre intimité   on reste des heures à tourner en rond   debout assis allongés    lentement      rapidement       la sueur s’échappe se fondant dans les objets les murs » (p. 17)

« Les livres brûlent dans la bibliothèque   les vitraux explosent      les cendres étouffent les gorges de leurs bourreaux    les pages crient pendant que les mots s’effacent avec les histoires   les pierres en chute libre écrasent les passés » (p. 45)

« À mon arrivée en ville on me donne l’adresse d’un bureau où on me demande ma date de naissance où on sort une liste de mes amis d’adolescence    je ne me souviens pas d’eux  je dois les contacter   il faut apprivoiser une vie sociale »  (p. 117)

 

 


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