mercredi 19 octobre 2022

La bigame de Felicia Mihali

 

Felicia Mihali trace sa route lentement et dignement à titre d’écrivaine, de traductrice et d’éditrice. Elle sort deux fois plutôt qu’une des chemins balisés. Son roman La bigame paru chez Éditions Hashtag en 2018 procure une lecture singulière et formidable.

Dans cette histoire, une narratrice quitte la campagne roumaine et les rues affairées de Bucarest pour les quatre saisons de Montréal. Elle part avec son compagnon Aron, l’intello élégant, érudit et contestataire. Notre narratrice débute des études littéraires à l’université. Peu à peu, le cercle du couple s’agrandit jusqu’au jour où survient Roman, tout aussi fascinant que le premier. Un jour, lassée de materner Aron, elle le quitte pour gagner les bras de Roman.

Le monde est vu par la lorgnette fascinante de la narratrice. Elle analyse la conduite des autres et se connaît très bien aussi. Il y absence de répliques entre la couverture et la quatrième de couverture. Ce roman justifie à lui seul cette étude psychologique réussie de la protagoniste et d’autrui.

Felicia Mihali nous pose les questions suivantes :

Quitte-t-on vraiment ses racines ? Oublie-t-on la maisonnée de sa mère, le pays du père si distant et ses traditions lourdes ? Un amoureux en vaut-il un autre ? Est-il possible de s’épanouir avec un deuxième homme tout en gardant une certaine tendresse pour le premier ? L’intégration dans ce nouveau monde se crée-t-elle en jetant un pont entre l’Europe d’hier et l’Amérique de maintenant ? Est-il approprié de se sentir à la fois d’ici et d’ailleurs ?

Je vous invite chaleureusement à lire ce roman avec cette narratrice proactive, dynamique qui décide de s’inventer un avenir plutôt que de subir la banalité des jours. J’adore !

Extrait : 

« Plus que tout, je me sentais utile dans sa vie grâce aux conseils avisés que je lui donnais pour améliorer son travail de journaliste communautaire. Il m’écoutait, méfiant. Mon arrivée dans sa vie rimait avec la conquête, non seulement d’une femme, mais aussi de l’art le plus subversif qui soit, celui de la parole. »


© Photo, texte du billet, sauf l’extrait de Felicia Mihali, Denis Morin, 2022

 

 

 


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