Sylvain Larose vient de me faire
revivre certains souvenirs du secondaire, moi qui suis presqu’à l’aube de la
soixantaine. Cet enseignant progressiste et féministe vient de faire paraître en
2021 chez Les Éditions Sémaphore le roman Débandé. Superbe satire
du monde scolaire sur un tableau brossé à la craie de l’école publique ou via
un PowerPoint aux commentaires mordants. Ce n’est pas parce que l’on sourit à
maintes reprises que c’est nécessairement hilarant. Ce portrait du monde
de l’enseignement dépeint certains professionnels imbus de leur pouvoir
professionnel.
Par exemple, imaginez Éric, un prof
d’histoire, préretraité, râleur à souhait, idéaliste en début de carrière, mais
de plus en plus désenchanté au fil des années, insécure sous un vernis d’arrogance.
Son couple et sa vie de famille sont des échecs lamentables. Sur ce plan, il n’atteint
pas la note de passage. Il gère ses classes comme il le ferait avec des recrues
dans l’armée. Silence, écoute, discipline, performance, travail sont de mise. Il
encense rarement, il commente et abaisse plutôt par ses commentaires. Il formate
les citoyens de demain qui seront des individus dociles, sauf quelques
étudiants qui lui tiennent tête dont une adolescente éprise de liberté ayant
une mère qui siège sur le conseil des parents.
Jusqu’où cette dictature de l’enseignant
se poursuivra-t-elle ? Peut-on éduquer des jeunes comme on le ferait de bêtes
de cirque par des cris, des claquements de doigts ? La rigueur intellectuelle signifie-t-elle
le contrôle absolu du cursus académique des autres ? Je vous invite évidemment
à découvrir ce roman à la prose déjantée et cynique de ce nouvel auteur
québécois.
Extraits :
« Je sais que je ne suis pas
juste. Certains jeunes veulent apprendre et ils sont contents d’être à l’école.
Mais il y a les autres. Je ne peux pas bâtir quelque chose en oubliant les poches,
les délinquants, les frustrés. Ben non, si tout le monde était discipliné et
avait hâte d’apprendre, je ne serais pas comme ça. Je pourrais me passer du système
de terreur… »
« Je n’ai pas à les baigner d’amour
gluant pour être un bon prof ! Et puis, mes cours, ce ne sont pas des derbys de
démolition non plus ! Je ne hais pas mes élèves, au contraire… sauf qu’un
minimum de détachement est nécessaire… Est-ce que je suis détaché ? Pas sûr…
Mais non, je ne les démolis pas. Je ne les déteste pas. Reste que l’ennemi, c’est
eux. »
© Photo, texte du billet, sauf
les extraits de Sylvain Larose, Denis Morin, 2021
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