vendredi 25 septembre 2020

Pour une absente de Martine Roffinella

 

Martine Roffinella ose, se méfie des lieux communs, emprunte des chemins qui lui sont propres. Dans ce nouvel opus Pour une absente paru en 2020 chez Rhubarbe, maison qui publie des textes inclassables, elle nous cause non pas d’une femme, mais de deux femmes. 

En effet, la première partie est un hommage à Barbara intitulé Elle prend la voix. Nous avons cette artiste en ce point en commun. Nous adulons la chanteuse qui débuta sa carrière en Belgique et sur la Rive gauche à Paris, assise au piano ou dans sa chaise berçante. Barbara nous cajole avec ses mots sombres, ses notes parfois cristallines. Certains poèmes semblent avoir été provoqués par des mots de chansons égrenés comme cailloux et fil d’Ariane pour que ravissement et joie nous reviennent et pour que des chansons surgies de la mémoire nous guérissent des amours anciennes. Défi relevé et réussi. 

Dans le deuxième segment désigné par Les lieux d’attente… Barbara en aurait fait une balade mélancolique de ce beau titre. Ici, c’est la bien-aimée, celle que l’on aurait couverte de lumière et de miel, que l’on attendait ou que l’on attend encore à la gare ou au coin du feu sous les flammes jaunes aux reflets mauves. Cette bien-aimée donnait à la poète des élévations telle la fumée d’encens qui monte en volutes dans l’air tiède d’une église romane toute de pierre construite, mais c’est dans la consternation et l’émoi que cette femme chérie a abonné la poète au journal quotidien du manque, du vide, du pourquoi et du ‘’j’aurais voulu te garder mais le train sifflait déjà ton départ’’. Aussitôt arrivée, à peine étreinte que voilà disparue.

Extraits du segment sur Barbara… 

« Vous n’étiez pas au rendez-vous

Mais elle attend

Ici même

Pas encore de voyage

Elle déjà derrière

Eux toujours devant

L’illusion du mimosa

Et des îles bétonnées

Aux assassins blonds d’amours »

 

« La photo est bonne

Quel besoin d’y revenir

Puisque la scène double ses mains

Comme une transparence ouverte »

 

Extrait du segment sur les lieux d’attente… 

« Je t’avais gardé un arbre

Tu y es entrée nue

Tu n’as rien trouvé beau

Rien d’autre que les chantiers

Qui bordent les histoires neuves

J’aurais dû percevoir

Dans ton goût pour la sève

Ton refus des choses grises

Tu murmurais

Il y avait tant de chaleur

Que mes pieds se sont brûlés »

Si vous souhaitez lire de la poésie qui s’adresse à la tête et au cœur, vous vous arrêtez à la bonne enseigne. Pour votre information, la photo floue en couverture est de l'écrivaine, blogueuse et photographe. Bonne lecture.

© Photo, texte du billet, sauf les trois extraits de la poète, Denis Morin, 2020

   

 


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