mardi 10 mars 2020

Asphyxies de Sébastien-D. Bernier



Issu du monde du théâtre (dramaturge, comédien, metteur en scène), Sébastien-D. Bernier nous propose en 2020 chez Les Éditions Sémaphore, Asphyxies, un roman de science-fiction, dont certains aspects avaient été abordés dans sa pièce La dernière mise, pièce primée deux fois.

Imaginez un Québec en 2093 où l’azur tourne au brun sépia, où des citoyens désabusés et désargentés sont payés par un État interventionniste pour prendre soin de personnes âgées centenaires, où des caméras, des systèmes de détection, des androïdes et autres créatures vous surveillent et gèrent vos vies. Le silence est une denrée rare, quasi inexistante, avec les hologrammes constants qui diffusent des publicités gouvernementales et de sociétés pharmaceutiques.

Cette année-là, Patrice Lajoie sorti de prison s’installe chez sa sœur Régine et son beau-frère Charles. Il n’a qu’en tête de porter des lunettes conçues pour jouer à des jeux illégaux en ligne. Surpris par Terminal 037, Régine et Charles devront par mesure de rachat sociétal s’occuper de Stéphanie Dumont, âgée de 117 ans, qui aime le beau, les arts et les chansons qu’elle chante pour embêter le trio. Les deux garçons gagent sur la fin de vie de leur nouvelle pensionnaire En dépit de l’écart d’âge, Stéphanie et Régine développent une certaine complicité, mais Régine verra sa compassion la consumer à petit feu. Jusqu’où peut-on s’oublier pour prendre soin des autres ? Peut-on mettre des limites pour éviter les abus de toute sorte ? Quel prix a le dévouement ?

Ce roman décoiffe, ébranle les certitudes. Il nous fait réfléchir aussi sur les aidants naturels ou non qui prennent soin des personnes âgées ou handicapées. À l’heure du politiquement correct et de l’emprise progressive de l’État, où la liberté d’expression peut être muselée, ce roman déconcertant et pertinent dépeint la société occidentale dans laquelle pourrait vivre demain les enfants de maintenant.

À lire, si vous aimez la science-fiction, la philosophie et les enjeux sociaux. J’ai très apprécié.

Extrait :

« Régine trouve injuste d’être traitée ainsi, uniquement parce qu’elle n’a pas officiellement dénoncé les joueurs. Si son frère avait au moins été condamné à quelques mois de confinement dans la dimension 22, elle aurait reçu sa peine avec une once de satisfaction. Or, le voilà assis à côté d’elle, ni complice ni récidiviste, jouant les premiers de classe, en espérant que Terminal 037 prenne note de son "étonnante réhabilitation". »

© Photo, texte du billet, sauf l’extrait de l’auteur,
    Denis Morin, 2020

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