Issu du
monde du théâtre (dramaturge, comédien, metteur en scène), Sébastien-D. Bernier
nous propose en 2020 chez Les Éditions Sémaphore, Asphyxies, un
roman de science-fiction, dont certains aspects avaient été abordés dans sa
pièce La dernière mise, pièce primée deux fois.
Imaginez
un Québec en 2093 où l’azur tourne au brun sépia, où des citoyens désabusés et désargentés
sont payés par un État interventionniste pour prendre soin de personnes âgées
centenaires, où des caméras, des systèmes de détection, des androïdes et autres
créatures vous surveillent et gèrent vos vies. Le silence est une denrée rare,
quasi inexistante, avec les hologrammes constants qui diffusent des publicités
gouvernementales et de sociétés pharmaceutiques.
Cette
année-là, Patrice Lajoie sorti de prison s’installe chez sa sœur Régine et son
beau-frère Charles. Il n’a qu’en tête de porter des lunettes conçues pour jouer
à des jeux illégaux en ligne. Surpris par Terminal 037, Régine et Charles
devront par mesure de rachat sociétal s’occuper de Stéphanie Dumont, âgée de 117
ans, qui aime le beau, les arts et les chansons qu’elle chante pour embêter le
trio. Les deux garçons gagent sur la fin de vie de leur nouvelle pensionnaire En
dépit de l’écart d’âge, Stéphanie et Régine développent une certaine complicité,
mais Régine verra sa compassion la consumer à petit feu. Jusqu’où peut-on s’oublier
pour prendre soin des autres ? Peut-on mettre des limites pour éviter les
abus de toute sorte ? Quel prix a le dévouement ?
Ce roman
décoiffe, ébranle les certitudes. Il nous fait réfléchir aussi sur les aidants
naturels ou non qui prennent soin des personnes âgées ou handicapées. À l’heure
du politiquement correct et de l’emprise progressive de l’État, où la liberté d’expression
peut être muselée, ce roman déconcertant et pertinent dépeint la société
occidentale dans laquelle pourrait vivre demain les enfants de maintenant.
À lire,
si vous aimez la science-fiction, la philosophie et les enjeux sociaux. J’ai
très apprécié.
Extrait :
«
Régine trouve injuste d’être traitée ainsi, uniquement parce qu’elle n’a pas
officiellement dénoncé les joueurs. Si son frère avait au moins été condamné à
quelques mois de confinement dans la dimension 22, elle aurait reçu sa peine
avec une once de satisfaction. Or, le voilà assis à côté d’elle, ni complice ni
récidiviste, jouant les premiers de classe, en espérant que Terminal 037 prenne
note de son "étonnante
réhabilitation".
»
©
Photo, texte du billet, sauf l’extrait de l’auteur,
Denis
Morin, 2020
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