Martine Roffinella nous revient en 2020 avec le savoureux roman Conservez comme vous aimez aux Éditions François Bourin.
En voyant les plats pastels dans une palette de couleurs agréables et douces, je me suis dit que j’allais lire une histoire de gens esseulés qui se réunissent pour de la vente de contenants en plastique et autres matériaux. Je n’avais pas lu la quatrième de couverture.
Puis dès les premiers paragraphes, j’ai senti le tapis me glisser sous les pieds ou plutôt je me suis senti emporté par le dérapage de Sibylle, rédactrice publicitaire aux portes de la cinquantaine qui travaillait jusqu’à l’arrivée de Capucine, Princesse Commerciale, une blondinette vaniteuse et ambitieuse, dans une boîte de publicité dirigée par P.Y., un égocentrique qui se tamponne les narines avec de la neige et qui utilise abusivement d’un franglais irritant.
Sibylle connut ses heures de gloire avec son slogan Conservez comme vous aimez à la suite d’une campagne pour une gamme de contenants en plastique allant au frigo et au congélateur, slogan que la nouvelle recrue de la boîte trouve trop proustien. Cette dernière revampe le concept par un J’aime, je conserve. Reléguée aux oubliettes, Sibylle développe des manies qui tournent à l’obsession, ce que l’on qualifierait de trouble obsessionnel compulsif. Elle vérifie ses phares de voiture, elle resserre ses robinets, elle s’assure de l’étanchéité de ses 101 plats mis au congélateur, etc. Elle est suivie par un Papa-Psy qui lui prescrit des cachets anxiolytiques ou autres. Il menace de la faire interner, si elle ne réprime pas l’expression de certaines envies. Sibylle écrit même à un commissariat pour attirer l’attention sur elle. Selon toutes les apparences, elle est devenue barjo, folle à lier ou presque.
Ce roman questionne beaucoup la société occidentale du ‘’consommez et jetez’’, d’éphémérité, de course au pouvoir, de vanité. Nous vivons dans une prison des apparences où les personnes authentiques se font broyer par une concurrence impitoyable.
Durant la lecture, j’imaginais Isabelle Huppert en Sibylle, Thierry Lhermitte en patron despotique et Léa Seydoux en Capucine. Je me suis fait mon cinéma et c’est le propre des histoires bien ficelées que de provoquer la réflexion et l’évasion. (Pour ma photo, j’ai opté pour des plats allant au four. Je me suis amusé simplement avec l’harmonie des couleurs.) Je fais aussi exprès de ne pas mettre d'extrait, puisque je souhaite piquer votre curiosité.
Pour le reste, je n’en dirai pas plus. Voici un roman psychologique à découvrir !
Vivement Martine Roffinella !
© Photo, texte, Denis Morin, 2020
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