Peu de
gens savent aborder le deuil avec délicatesse, tendresse, sans mot superflu,
comme le firent Victor Hugo avec Les contemplations, Anne
Philippe avec Le temps d’un soupir, Gabriel Zimmermann avec Depuis
la cendre. Josette Hersent le fait tout aussi brillamment.
Ainsi,
elle publiait en 2013 aux Éditions du Chameau le recueil Deux dates sur
une pierre, une suite à Blaise ou la symphonie inachevée,
recueil paru en 2009. J’avais fait un billet à ce propos.
Dans ces
deux livres, elle nous entretient de son lien maternel face à Blaise Hersent-Lechâtreux
(1970-2006), jeune diplômé, enseignant, fondateur du Parti Blanc pour signaler son
refus de voter, musicien, plus précisément pianiste.
Ce qui me frappe
le plus dans l’écriture de Josette Hersent, c’est la fluidité du style. Elle n’impose
pas son deuil. Elle nous le partage en évoquant la vie de son fils. Elle nous
raconte ce fils porté, chéri, aimé comme ses autres enfants tout bonnement.
Elle pleure ce départ précipité. Elle dépeint les joies de la maternité et de l’enfance
qui s’éveillait à la vie sous ses yeux, l’élève brillant, le frère et l’ami
bien-aimé, l’oncle complice, le musicien.
On voit la
poète qui, au cimetière communal, va saluer son frère, mort jeune adulte, le
temps d’un Ave, avant d’aller visiter Blaise à quelques pas de là, dans une
même allée, membres d’une même famille ici-bas, membres d’une même famille dans
l’au-delà.
Somme
toute, c’est en lisant la mère que je redécouvre son fils si attachant, si
brillant. Sous les mots délicats et précis de Josette, j’entends Blaise jouer
au piano pour exprimer sa joie d’être là, même à distance. Sa mère lui parle et
Blaise nous répond, présent. Magnifique !
Extraits :
« Je ferme doucement, les yeux, et je te vois…
Assis à ton piano, sur ses
touches… tes doigts…
Légers vifs à la fois ou doux
comme caresse
Glissant sur une étude ou se
jouant de tristesse… »
« C’était à ce moment où le manque creusait
En dedans de mon ventre un douloureux abcès
Souviens-toi, m’as-tu dit, du garçon, du bébé…
Qui a laissé la place à l’homme que j’étais…
Ce garçon, ce bébé, tu ne l’as pas pleuré
Chaque étape de vie, le faisait évoluer
Quand tu ne le « voyais » plus, pourtant il
était…
Et mon âme, aujourd’hui, elle, ne t’a pas
quittée. »
© Photo, texte du billet,
sauf
les mots de Josette Hersent et de Blaise,
Denis Morin, 2019
Vous avez saisi, avec intelligence et sensibilité, ce que seule la poésie peut traduire d'indicible dans le domaine particulièrement sensible de la perte d'un être cher. Merci pour vos mots délicats, merci beaucoup. Josette Hersent.
RépondreEffacerChère Josette,
EffacerQuand je lis un roman, un essai, du théâtre, c'est la tête qui décode, mais quand je lis de la poésie, j'y vais au flair.
J'ai lu vos mots tout en entendant Blaise au piano.
Surtout, n'arrêtez jamais d'écrire. Denis Morin
Très heureux de connaître cette auteure dont ses mots ne cessent de capturer chaque jour mon attention... Merci beaucoup pour cette découverte et ce grand partage Denis !
RépondreEffacerAmicalement et poétiquement,
Stéphane Kabamba
Bonjour Stéphane,
EffacerJe tente d'attirer la lumière des projecteurs sur des artistes qui ne reçoivent pas l'attention des grands journaux.
Au plaisir Stéphane !
Cordialement,
Denis Morin