mardi 23 juillet 2019

Christine, la reine-garçon de Michel Marc Bouchard






Le théâtre québécois aborde à l’occasion les biographies de personnages illustres et singuliers. Je me souviens avoir vu la pièce de Jovette Marchessault, autrice, peintre et féministe (1938-2012) intitulé Le voyage magnifique d’Emily Carr (pièce montée en 1990 sur cette peintre canadienne connue pour ses paysages de l'Ouest canadien et ses références aux Premières Nations). C’était fabuleux.

Le Théâtre du Nouveau Monde à Montréal avait eu l’idée fabuleuse de monter en 2012 la pièce de théâtre Christine, la reine-garçon du dramaturge québécois Michel Marc Bouchard. Ce texte exquis fut publié la même année aux Éditions Leméac.

Rappelons que Christine de Suède (1626-1689) était autant à l’aise à côtoyer les militaires, à forcer la main de belligérants pour la signature d’un traité de paix que de discuter avec Descartes des questions d’ordre philosophique.

Partagée entre le devoir d’état et le tourment amoureux suscité par sa belle dame de compagnie, Christine préféra choisir sa vie plutôt que de la subir. Féministe avant l’heure, elle sut s’entourer d’artistes et de penseurs.

Je regrette de n’avoir pas vu cette pièce au théâtre. Par contre, je me reprends ici en lisant des dialogues savoureux et brillants. Voici un livre à avoir dans sa bibliothèque pour qui aime l’histoire et le théâtre.

Extrait :

« CHRISTINE. Toutes ces paroles assourdissantes posées sur des chiffons ! Les soins que vous apportez à votre personne. Les précautions à votre peau. Et tous vos gestes délicats, si délicats… Comtesse Sparre, vous représentez en tous points ce que je déteste chez les femmes. Leur besoin insatiable de plaire ! Cette habitude de n’exister que dans le regard d’un tiers. Et que dire de cette absence totale d’assurance.

EBBA, blessée. Je ne savais pas que je pouvais vous être déplaisante à ce point.

CHRISTINE. Et moi, je ne sais comment vous le dire, et je ne sais comment me l’expliquer à moi-même, mais je ne voudrais pour rien au monde que vous changiez quoi que ce soit à votre personne. Pour rien au monde. Que vos gestes délicats le demeurent ! Parlez chiffons comme on fait des poèmes, breloques comme on fait des hymnes. Et là, je ne sais ce qui m’arrive, mais j’ai l’envie soudaine de dévorer un gros gigot. »

© Photo, texte du billet,
    sauf l’extrait de Michel Marc Bouchard,
    Denis Morin, 2919




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