Cette écrivaine possède deux pôles créatifs : la poésie et la nouvelle. Aucun mot de trop pour toucher le coeur et l'esprit. Voyons ce qu'elle a à nous dire.
Comment vous est
venu le goût d’écrire ?
J’ai d’abord toujours aimé beaucoup la lecture. Depuis que
j’ai appris à lire, je dévore pas mal tout ce qui me tombe sous la main. Je lis
presque à 100 % de la littérature québécoise. J’ai écrit de la poésie à partir
du cégep. J’ai ensuite commencé l’écriture de la nouvelle à l’université et
j’ai publié mes premiers recueils de nouvelles et de poésie alors que j’avais
28 ans.
Est-ce le sujet qui
appelle la forme (nouvelle, poésie) ?
Ce sont effectivement les premières phrases qui me viennent
en tête qui appellent la forme du texte. Si j’ai une phrase poétique, ce sera
de la poésie; si c’est une idée plus conceptuelle, ce sera sans doute une
nouvelle. Mais il est certain que mes nouvelles sont très poétiques et que ma
poésie est souvent très narrative. Les deux formes se suivent de près.
Mireille l’écrivaine
est-elle si différente de Mireille de la ‘’vie ordinaire’’ ?
Je crois qu’elles sont extrêmement différentes, car elles
ne se côtoient que très rarement dans la vie quotidienne. Mais la nature les
unit. C’est la passerelle entre les univers, un premier très pratique, et un
second plus métaphorique.
Le territoire est
très présent dans vos écrits, dans quel lieu physique ou psychologique
écrivez-vous ?
J’ai deux lieux d’écriture dans ma tête. Le
premier : je suis assise à l’Île aux grues au beau milieu d’un petit
chemin qui mène à la grève. C’est une colline entourée de champs de trèfle.
C’est un territoire que je connais très bien pour y avoir passé mon enfance. Le
second : il est arrivé plus tard dans ma vie. C’est un lieu en plein cœur
de la ville, à Québec, en face de Place Laurier, dans un abri d’autobus. Il est
aux antipodes de ma jeunesse à la campagne, soit la ville. Il représente le
quotidien effréné qui me poursuit.
Votre écriture est
précise, d’une précision chirurgicale, avez-vous déjà songé aux sciences, aux
mathématiques, à la musique classique ?
J’ai étudié en informatique de gestion au cégep. Malgré que
je n’aimais pas vraiment ce domaine, je remarque qu’il puisait dans une de mes
forces, celle de la raison et de l’équilibre. Le nombre de poèmes, la division
du recueil, la conceptualisation derrière, la rythmique des mots… Le fait qu’il ne reste jamais un mot de trop
dans mes textes, cela répond à mon esprit cartésien. Je dois toutefois faire
très attention de mettre en veilleuse cette caractéristique dans mon processus
de création et de la faire intervenir seulement vers la fin, sinon je
n’arriverais jamais à créer.
Avez-vous ou non un
rituel d’écriture ?
Je n’ai aucun rituel d’écriture. Comme je travaille à temps
plein et que j’ai des enfants en bas âge, je prends l’écriture quand elle
passe. S’il faut que j’écrive sur une facture d’épicerie, je le fais. J’essaie
de trouver un peu de temps par-ci par-là, mais quand l’inspiration arrive,
c’est comme un tsunami, je dois mettre sur papier les idées sinon je les perds.
Écrire, c’est être
libre. Qu’en pensez-vous ?
Particulièrement pour moi, écrire représente la liberté,
car c’est le temps que je me donne pour exister en dehors du quotidien. C’est
comme une vie parallèle qui se crée à mes côtés.
Avez-vous déjà songé
à écrire un polar ou un scénario de film ?
J’aimerais bien écrire un scénario de film. On m’a dit à
plusieurs reprises que mon écriture était très imagée. J’ai un projet potentiel
avec un ami cinéaste, un retour sur mon recueil de nouvelles Le syndrome de
takotsubo. À suivre…
Comment
décririez-vous votre écriture en cinq mots ?
Je vise à ce que mon écriture soit le plus possible :
concise, profonde, lumineuse, réflexive, innovante.
Qu’évoque l’œuvre Hommage à Rosa Luxembourg de Riopelle ?
Cette œuvre représente pour moi la liberté, la force, le
chaos et l’équilibre parfaits de la nature, la migration, la chasse, la création,
mon père. C’est une œuvre magnifique, c’est un recueil de poésie en soi. On
pourrait y faire des millions de lectures. Elle me touche particulièrement, car
mon père a connu Riopelle alors qu’il était guide de chasse et cette œuvre me
donne accès à son univers et à sa beauté.
La lumière
surgit-elle au-delà de l’apparent chaos du monde, à la manière des portraits de
Rembrandt ?
Je crois que pour prendre conscience de la lumière, il faut
creuser dans l’ombre et dans le chaos. Alors surgit la lumière dans toute sa
profondeur.
D’autres projets en
vue ?
Je suis en train d’écrire un 4e recueil de
poésie, sur la légèreté cette fois. Je ne sais pas encore quelle forme il va
prendre, mais quelques personnages ont surgi… d’autres restent à venir. Je
laisse le tout prendre forme tranquillement.
© Photo, Denis
Morin, 2019
Entretien, Denis Morin, Mireille Gagné, 2019
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