samedi 19 mai 2018

Autre naissance de Forough Farrokhzad



Forough Farrokhzad (1935-1967) était à la fois poétesse, actrice et cinéaste.  Cette artiste secoua la poussière en Iran où on la percevait comme une femme excentrique dont il fallait taire le nom et qu’il fallait avoir à l’œil.  Elle vivait pour la poésie et l’ordinaire de la vie eut raison d’elle, puisqu’elle mourut dans un banal accident de voiture.

La notoriété lui vient (mal)heureusement surtout à titre posthume.

Les Éditions du Noroît, à Montréal, ont eu la brillante idée en 2017 de nous la faire découvrir en français, grâce aux bons de Bahman Sadighi poète, peintre et traducteur vivant maintenant à Montréal.

À travers les mots de Forough Farrokhzad, j’ai revu les destins singuliers tels que Camille Claudel et Virginia Woolf.

Dans ce recueil Autre naissance, Forough s'ennuie vraiment dans la banalité des choses et du quotidien. Par son imaginaire, elle emprunte des chemins de traverse.  Sa poésie contient tendresse, amour, désir, refus du conformisme et féminisme. 

Je vous livre un instant de contemplation sur le bord d’une fenêtre :
« Dans l’attente de la pluie d’un nuage inconnu
Le bassin de notre maison est vide
Les petites étoiles inexpérimentées
Tombent par terre de la hauteur des arbres
Et dans la nuit. »

Voici un soupçon de féminisme :
« J’ai balayé les marches du toit
Et j’ai lavé les vitres des fenêtres
Pourquoi seul le père a-t-il le droit
De rêver pendant le sommeil ? »

Et là, une sensualité qui lui serait reprochée :
« Mon amant
Est un homme simple
Un homme simple que j’ai
Enfoui
Dans le pays néfaste des merveilles
Tel le dernier signe d’une religion étrange
Dans les replis du creuset de mes seins. »

Ou bien encore une touche de mélancolie :
 « Dans une chambre à la grandeur de la solitude
Mon cœur
À la mesure d’un amour
Regarde les prétextes simples de son bonheur
Le beau déclin des fleurs dans le vase. »

Je vous recommande cette lecture pour un point de vue féminin sur le monde.  Ses poèmes écrits sont écrits en toute franchise, sans aucune censure.  Le traducteur a cru bon d’écrire quelques pages en fin de recueil pour nous la présenter et la situer dans le contexte culturel de son époque.  À découvrir.


© texte et photo, Denis Morin, 2018

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