mercredi 8 décembre 2021

Journal d'un bibliothécaire de survie de Charles Sagalane

 

Le poète s’inscrit dans le paysage. Sa bibliothèque de survie est trace sur la neige, hululement de la chouette, regard du lynx, lenteur du béluga pourfendant les eaux de l’estuaire. 

Quand le livre choisit son auteur et son lecteur ? Nous avons en commun des ancêtres blancs et autochtones, lui, innus, moi, malécites et une fascination pour le Japon. Lui, à cause du poète japonais Matsuo Bashō, ayant vécu au 17e siècle, et moi, à cause de deux grand-tantes et d’une tante, toutes missionnaires au Japon. À chacun sa mythologie et ses sujets de fascination.

Assez causé du blogueur. Revenons à Charles Sagalane, ce beau poète complètement fou qui a fait publier en 2021 chez La Peuplade, ce récit intitulé Journal d’un bibliothécaire de survie. Il est le coureur des bois de la poésie québécoise. À d’autres siècles, on plantait des croix pour le roi de France de François 1er à Louis XIV, notre artiste plante sur des îles, à l’orée de boisés des bibliothèques de survie qui correspondent en des boîtes de bois vitrées contenant des livres ensachés. Il est prévisible que la vie du livre sera affectée favorablement ou non par le lectorat et les aléas climatiques. Certains écrits sont capteurs d’humidité et d’autres de rêves. Certains visiteurs écrivent leurs commentaires spontanés à la suite de la découverte d’un titre. 

Charles Sagalane raconte son itinéraire de 2013 à 2020 à titre de diffuseur sur un territoire aussi vaste qui va des Maritimes à Winnipeg, puis du Québec vers le Mississipi, ce qui correspond somme toute aux territoires de la Nouvelle-France naguère. Il y rencontre des écrivains qui se font à leur tour bibliothécaires de survie et des arbres, des rochers, des forêts, des lacs, des îles, où il parsème la littérature ce Petit Poucet des lettres. Les segments de son fascinant récit se dégustent et les truffes sont des haïkus de son cru.

Je referme le livre charmé de m’être baladé dans l’imagin-air-e de cet érudit nomade.

Extraits  

« Tant pis su je me laisse encore attraper par l’un de ces esprits flottants. Il fera de notre vie un jeu insensé, inédit au point qu’il faudra des années pour le relater. Un jour, c’est promis, nous irons à Motosu, méditer sous un cerisier qui porte le nom d’Usuzumi Zakura. Tu verras que ses mille cinq cents ans ne l’empêchent pas de fleurir. »

« Chaloupe d’enfance

le dos d’une ouananiche

scintille au soleil »


© Photo, texte du billet, sauf les extraits de C. Sagalane, Denis Morin, 2021

 

 


Aucun commentaire:

Publier un commentaire