Suzanne
Myre publiait en 2010 le recueil Nouvelles d’autres mères aux
Éditions Marchand de feuilles.
L’écrivaine
décrit avec humour, cynisme et tendresse ce lien qui nous unit à la mère
envahissante, celle qui a peur de se faire ravir sa place auprès du mari, celle
qui insiste pour un voyage mère-fille car le temps presse, celle qui vous dit
que vous avez un don pour l’écriture, celle dont on porte l’urne et les
souvenirs, celle qui est kleptomane parce qu’elle veut nourrir son petit au
bio, celle qui se suicide par mélancolie, celle qui attend nos appels
téléphoniques.
J’ai lu
ce recueil le sourire aux lèvres et la larme à l’œil. Les émotions, ça ne se
provoque pas n’importe comment et ça ne s’écrit pas facilement. Ça prend du doigté
et un supplément d’âme. Merci Suzanne Myre pour l’intelligence et ce supplément
d’âme.
Extraits :
« Je n’ai pas dormi de la nuit. Quand ça fait des
années qu’on a quitté la maison paternelle, dormir à côté de sa mère est
angoissant. J’avais l’impression de régresser. Surtout au moment du bisou-bonne-nuit.
Je pouvais voir son corps se soulever paisiblement à chacune de ses respirations,
délicate montagne de quarante-neuf ans d’où j’étais issue… »
« J’entends parfois sa voix, quand elle me disait
doucement : « Je serai toujours là avec toi, près de toi ». Mais,
c’est où, là ? Hier, j’ai enfin osé
regarder mon reflet dans le miroir en brossant mes dents. Droit dans les yeux,
biens secs pour une fois. Droit dans mon chagrin. C’est alors que je l’ai vue. »
« Une fois que mon masque d’ange est en place, j’utilise
mes grandes manches et j’y camoufle biscuits, pots de sauce, raisins secs et
vitamines, que je largue dans mes grandes poches. Pas trop à la fois. Si j’ai l’air
d’une baleine à culottes de cheval en sortant du magasin, je vais éveiller des
soupçons. On n’engraisse pas à faire son épicerie, ce serait même tout le
contraire. »
© Photo, texte du billet,
sauf les extraits de Suzanne Myre,
Denis Morin, 2019
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